L’habilitation à agir en justice du syndic de copropriété

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Le contentieux du droit de la copropriété est un contentieux habituel des tribunaux.

Un syndicat des copropriétaires ne peut toutefois agir seul et, il est pour cela obligatoirement représenté par son syndic de copropriété.

L’article 55 du décret du 17 mars 1967

Toutefois, en vertu de l’article 55 du décret du 17 mars 1967 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, récemment modifié par le décret n°2019-650 du 27 juin 2019, le syndic de copropriété ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l’assemblée générale.

Ainsi, en l’absence d’habilitation, l’action intentée par le syndic de copropriété serait irrecevable. En cas d’irrecevabilité, la copropriété est contrainte de reprendre sa procédure depuis l’origine, à condition que son action ne soit pas prescrite.

Ce principe d’ordre public souffre cependant d’exceptions légales et jurisprudentielles.

Les exceptions légales sont prévues par l’article 55 du décret du 17 mars 1967.

Elles concernent :

  • Les recouvrements de charges de copropriété et plus globalement de créances ;
  • La mise en œuvre des voies d’exécution forcée (à l’exception de la saisie en vue de la vente d’un lot) les mesures conservatoires ;
  • Les demandes qui relèvent des pouvoirs du juge des référés ;
  • Défendre aux actions intentées contre le syndicat : par exemple le syndic peut ainsi contester de lui-même une saisie-attribution pratiquée à l’encontre du syndicat ( Cass. 3e civ., 6 déc. 2006, n° 04-14.175).

Dans tous les cas, le syndic rend compte à la prochaine assemblée générale des actions introduites.

Les exceptions sont toujours définies strictement et c’est dans ces conditions que la jurisprudence a pu considérer que l’action intentée par un syndic au nom du syndicat pour faire liquider une astreinte prononcée contre des copropriétaires ne relève pas des exceptions précisées par l’article 55.

La Cour de cassation

La Cour de cassation a ici considéré qu’il ne s’agissait pas de la mise en œuvre d’une voie d’exécution forcée prévue par l’article 55, alinéa 2, du décret du 17 mars 1967 ( Cass. 3e civ., 20 déc. 2000, n° 99-15.236,).

Les exceptions jurisprudentielles ont été définies par la Cour de cassation. Elle a élargi les hypothèses dans lesquelles une habilitation n’est pas nécessaire.

Le syndic peut donc sans habilitation :

  • Déclarer une créance au passif d’un débiteur en redressement judiciaire : la jurisprudence assimile ici la déclaration de créances a une mesure conservatoire ( Cass. 3e civ., 29 janv. 2003, n° 00-21.945) ;
  • Reprendre une action engagée par l’ancien propriétaire de l’immeuble avant que celui-ci ne passe sous le statut de la copropriété. Les droits de celui-ci, en effet, sont passés au syndicat ( Cass. 3e civ., 10 oct. 1984, n° 83-14) ;
  • Interjeter appel ou se pourvoir en cassation au nom du syndicat, que celui-ci ait été demandeur ou défendeur en première instance (Cass. 3e civ., 8 juill. 1992 ; Cass. 3e civ., 22 mars 2000, n° 98-15.743).

L’autorisation doit intervenir avant l’introduction de l’action en justice par le syndic, c’est-à-dire avant la signification de l’assignation.

Une habilitation postérieure est toutefois possible tant que, d’une part, le juge n’a pas statué, et que d’autre part, le délai d’exercice de l’action n’a pas expiré (Cass. 3e civ., 19 déc. 2006, n° 05-20.559).

L’habilitation doit par ailleurs intervenir postérieurement à l’existence d’un contentieux puisque la résolution autorisant le syndic de copropriété à agir en justice doit viser précisément le litige et le copropriétaire.

Elle ne peut non plus être donnée pour des désordres futurs (Civ. 3ème, 02 juill.2008, n°07-14.139).

Changement de syndic

En cas de changement de syndic, l’habilitation donnée se transmet automatiquement à ses successeurs, sans qu’il soit besoin de la renouveler à chaque changement de syndic ( Cass. 3e civ., 6 déc. 2006, n° 05-16.949)

L’autorisation doit préciser l’objet de la demande et les personnes à assigner. L’objet de l’autorisation doit être précis.

Le syndic doit expressément avoir reçu mission d’agir en justice et avoir été chargé de formuler des demandes déterminées par rapport à des dommages précisément décrits (Cass. 3e civ., 28 févr. 2006, n°05-11.094)

L’autorisation doit, pour être opérante, indiquer l’objet du procès à introduire devant les juges du fond et préciser les désordres dont l’indemnisation est poursuivie (Cass. 3e civ., 6 juill. 2010, n° 09-66.588).

Ainsi sont valables :

  • Une première délibération de l’assemblée générale donnant pouvoir au syndic de poursuivre l’instance en cours, sans en indiquer l’objet et sans communiquer la moindre information au sujet de cette procédure, et une seconde délibération décidant, après avoir pris connaissance du jugement, de faire appel afin d’obtenir la réfection de la toiture mais sans préciser la nature des désordres (Cass. 3e civ., 6 mai 2003, n° 00-20.819, n° 564)
  • Une décision de l’assemblée générale autorisant le syndic à ester en justice dès le dépôt du rapport de l’expert pour demander l’exécution de celui-ci, sans préciser les désordres pour la réparation desquels l’habilitation est donnée (Cass. 3e civ., 22 nov. 2005, n° 04-17.876) ;
  • Une habilitation à agir en réparation de désordres affectant un immeuble en copropriété qui ne mentionne pas les désordres objet de la demande mais indique seulement que ceux-ci sont visés dans la mission confiée à un expert par le syndicat, ainsi que dans le pré-rapport d’expertise (Cass.3e civ., 4 juill. 2007, n° 06-12.801).

Les désordres à réparer

La Cour de cassation a également arrêté que si les désordres à réparer peuvent être désignés par référence à un rapport d’expertise, sans être précisément énumérés dans la décision d’autorisation du syndic, encore faut-il que ce rapport ait été adressé aux copropriétaires dans la convocation à l’assemblée générale (Cass. 3e civ., 16 déc. 2008, n° 07-19.133).

L’identité des défendeurs à l’égard desquels la procédure doit être clairement énoncées sous peine de nullité.

Une assemblée ne peut autoriser par avance le syndic à engager une saisie immobilière à l’encontre des copropriétaires débiteurs de charges. En effet, ceux-ci doivent être précisément désignés dans la résolution votant la saisie immobilière (Cass. 3e civ., 15 févr. 2006).

L’habilitation doit permettre d’identifier les défendeurs à l’action, préciser le fondement de l’action, les désordres concernés ou encore la nature des dommages (Cass. 3e civ., 29 janv. 2003, n° 01-01.483, n° 120, Cass. 3e civ., 21 mai 2008, n° 06-20.587, n° 569)

Catégorie : Droit immobilier
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